Traducteur: TheCounterspell
————-
Lith a pris la bouteille et fermé l’armoire à clé. Il ne voulait pas prendre le risque que Yurial passe d’une dépendance à une autre.
“A ce stade, tu devrais avoir compris le sens de ce que je t’ai dit après le deuxième examen. La vie est comme un creuset. Elle nous pousse jusqu’à ce que nous nous cassions, puis elle fait fondre les morceaux pour forger quelque chose de nouveau.
“Le moule est toujours le même, mais la personne qui en sort ne l’est pas. Nos croyances et nos convictions sont mises à l’épreuve chaque jour. Nous en gardons certaines, nous en rejetons d’autres. Quand cela arrive, une partie de nous meurt, pour ne jamais revenir.
“Tu n’es pas la même personne que tu étais au début de l’académie, tout comme tu n’es même pas la même personne que tu étais après avoir passé le deuxième examen. C’est la même chose pour tout le monde.
“Mon seul choix est d’embrasser le changement ou de continuer à pleurer mon passé autant que je pleure protecteur. J’ai besoin de tourner la page. Si je recule sans même essayer, je le regretterai toute ma vie et tôt ou tard, ce poids va me tuer.”
“Je comprends.” répondit Yurial.
“C’est pareil pour moi. Je sais que les choses ne peuvent pas redevenir ce qu’elles étaient, mais je ne peux pas non plus accepter ma situation actuelle. Contrairement à toi, je n’ai pas encore trouvé de réponse. Je n’essaierai plus de t’arrêter. Y a-t-il quelque chose que je puisse faire pour t’aider ?”
“En fait, il y a deux choses que tu peux faire. La première est de rester loin de l’armoire à alcool, la seconde est de ne pas dire aux filles que je suis parti.” Lith était de nouveau au top de sa forme et avait pris sa décision.
Je ne peux pas risquer leurs vies pour quelque chose comme ça. Je ne veux pas perdre quelqu’un d’autre. Il pensait.
Lith était sur le point de partir quand Yurial l’a arrêté en se tenant devant la porte.
” Je sais que tu pourrais me mettre à terre d’un seul coup de poing, tout comme je sais que tu crois faire ce qu’il faut, mais ce n’est pas le cas. Ce n’est pas nous protéger. C’est nous mettre de côté parce que tu penses que nous sommes une faiblesse.
“Je suis conscient que notre amitié n’est pas si profonde, nous n’avons commencé à parler pour de vrai que récemment, mais ta relation avec Phloria devrait compter pour toi. Si tu t’enfuis derrière son dos, tu trahis sa confiance. Aie au moins le courage de lui dire la vérité.”
Lith a soupiré, Yurial avait raison.
“Les mauvaises habitudes ont la vie dure. J’étais sur le point de faire la même erreur que je fais toujours. Traiter les gens comme s’ils étaient trop faibles ou stupides pour que leur volonté compte. S’il te plaît, viens avec moi dehors. Sinon Phloria va me tuer.”
Lith a laissé Yurial sortir le premier de la tente dimensionnelle. Comme il s’y attendait, Phloria l’attendait dehors. Quand elle a vu la porte s’ouvrir, elle était sur le point d’engueuler Lith. Mais Yurial en est sorti, la laissant surprise et soulagée à la fois.
“Tu me connais bien, n’est-ce pas ?” dit Lith.
“Laisse-moi deviner. Tu étais sur le point de t’éclipser et de nous laisser dans le noir. Comme tu as fait à ta famille pendant toutes ces années.” Le calme de Phloria n’a pas duré longtemps. Pas quand elle a vu le regard déterminé sur son visage.
“Oui, je l’étais. Yurial m’a déjà convaincu de ne pas le faire. Il n’y a pas besoin de me gronder à nouveau.”
“Tu veux dire que tu vas retourner à l’académie avec nous ?” Phloria n’en croyait pas ses oreilles.
“Non. Je vous renvoie tous, mais seulement après t’avoir expliqué la situation. S’il te plaît, entre. Yurial, s’il te plaît, laisse-nous seul.”
De retour dans la tente des garçons, Lith a lancé le sort Silence. Il n’avait aucune idée du fonctionnement de la magie qui déformait l’espace de la tente. Lith voulait être sûr que ce qu’il allait dire resterait entre eux deux.
“Crache le morceau, que j’entende ton excuse”. Phloria refusait de s’asseoir, appuyée contre le mur, les bras croisés.
Lith l’a vue mourir plusieurs fois en peu de temps. Son visage a fondu après avoir été éclaboussé par le poison de Clacker, sa tête a été mordue par quelque chose, et enfin, sa poitrine a été transpercée en de multiples points tandis que le sang trempait ses vêtements.
Toutes ces visions ne le faisaient pas vaciller, elles ne faisaient que renforcer sa conviction.
“Pas d’excuses, seulement la vérité. Tu as entendu la dryade. La ville minière a probablement été prise par les Clackers. Même en restant ici, c’est trop dangereux pour vous les gars. Utilisez le dispositif d’urgence et retournez à l’académie. Vous y serez en sécurité.”
“Pourquoi serait-ce différent pour toi ? Pourquoi ne pas revenir avec nous ? Il n’y a aucune raison de risquer ta vie pour un cadavre. Si la dryade a raison, les Clackers ont probablement déjà festoyé sur lui.”
Lith sentit sa rage bouillonner à cette pensée, mais il parvint à la réprimer.
“C’est différent parce que je suis différent de vous. Tu m’as vu en action. Je suis plus rapide et plus fort que n’importe lequel d’entre vous. Pendant que j’étais sous terre, j’ai tué deux de ces Clackers géants, alors que vous ne vous êtes occupés que de celui que je vous ai servi sur un plateau d’argent.”
“Depuis quand c’est un concours ?” rétorqua Phloria. Elle était déterminée à ne pas reculer.
“Ce n’est pas un concours. Je dis seulement que c’est beaucoup plus facile pour moi d’entrer et de sortir de la ville minière seul. Je te promets que je ne vais pas risquer ma vie inutilement. Si l’endroit est infesté de Clackers et que la situation s’avère trop dangereuse, je m’enfuirai.
“Je dois au moins essayer. J’ai besoin de voir Protecteur une dernière fois, même si c’est juste une tombe vide ou un cadavre infesté d’œufs. Il est… était mon meilleur ami, mon mentor, mon partenaire. Quand il est mort, j’étais si vaniteux et égocentrique que je n’ai jamais pu lui dire au revoir. Je lui dois bien ça.”
Phloria a vu Lith cligner des yeux trop souvent pour que ce soit normal. Elle savait qu’il avait encore du mal à combattre la Vision de la Mort et combien il était douloureux pour lui de voir ses proches mourir encore et encore.
‘Je ne veux pas qu’il y aille, je veux qu’il soit en sécurité. Mais peut-être qu’aller là-bas peut aider Lith à surmonter son traumatisme. Je ne peux pas vivre avec l’idée d’être même partiellement responsable de sa souffrance continue. J’espère que Raaz a raison et que le laisser partir est la bonne chose à faire.’
“Bien, mais je ne peux pas te laisser partir comme ça.” Elle a sorti une épée bâtarde de son amulette dimensionnelle.
Elle ressemblait à une épée longue avec une lame de 110 centimètres de long, mais la poignée était plus longue, permettant au manieur de l’utiliser d’une main ou des deux selon les circonstances.
Quatre cristaux magiques bleus y étaient incrustés, un de chaque côté de la lame et les deux autres de chaque côté de la poignée.
“C’était censé être ton cadeau d’anniversaire. J’ai demandé à mon père de forger quelque chose pour toi comme un cadeau de remerciement pour m’avoir sauvé la vie maintes et maintes fois. Tu aurais dû voir sa tête à l’époque.” Elle a gloussé.
“Il a réagi comme si je lui demandais de se couper la main droite. Après que je lui ai raconté tout ce qui s’est passé pendant l’attaque de Balkor et que ma mère et mes sœurs m’ont soutenue, il a cédé.
“Je lui ai expliqué que tu n’étais pas très doué mais incroyablement fort, alors il a fabriqué cette épée. C’est la première et pour l’instant la seule pièce de sa série de lames Gardien.
“Non seulement elle peut rétrécir, comme la mienne, permettant au manieur de se battre dans des espaces clos, mais elle peut également renforcer la force de tous les éléments canalisés dans l’épée. Chaque élément produit un effet différent.” Elle l’a tendue à Lith, qui l’a immédiatement imprégnée de son mana tout en effectuant quelques coups d’essai.
‘Ça veut dire que cette arme a aussi une magie de fusion ?’ Lith était étonné par la légèreté de l’épée. C’était la première fois qu’il voyait une arme fabriquée par Orion avec un double tranchant au lieu d’un seul.
“Puisque tu refuses d’entendre la raison, je te l’emprunte. Mais tu devras me la rendre. Elle n’est pas à toi avant ton treizième anniversaire, c’est clair ?”
Lith hocha la tête, en rangeant l’épée.
“Regarde le bon côté des choses.” Il a souri doucement, caressant sa joue.
“Je retournerai à l’académie dans moins d’une heure. Après cela, puisque nous n’allons pas rester dans cette forêt puante une minute de plus, je pourrai t’emmener à un vrai rendez-vous.”
Sans attendre sa réponse, Lith s’est envolé dans le ciel. Une fois qu’il était assez haut, il n’avait pas besoin de la carte pour trouver le chemin. Mais il ne s’est pas précipité. Il prit son temps pour conjurer et manipuler un nuage de basse altitude pour cacher son approche.
‘Cette mère couveuse est probablement une éveillée. Sinon, elle ne devrait pas être capable de commander des Clackers capables d’utiliser la magie. Si elle garde un œil sur le ciel avec Vision de vie ou quelque chose de similaire, mon déguisement sera inutile. Heureusement, il y a plus d’une façon de tuer une araignée.’ pensa Lith.
Il espérait qu’aucun Clacker ne s’intéresserait à un petit nuage de deux kilomètres de haut dans le ciel qui se déplaçait au gré du vent.
Quand il fut juste au-dessus de la ville minière, il regarda en bas avec sa vision de vie. Lith découvrit que toutes les maisons avaient perdu leurs enchantements, ce que le directeur leur avait fait n’était que temporaire.
Il y avait de multiples formes de vie, mais à en juger par leur nombre et leur force, il n’y avait rien qui puisse l’inquiéter outre mesure. Il continua à déplacer le nuage jusqu’à ce qu’il arrive à un point où, s’il se déplaçait assez vite, il pourrait descendre au sol sans être remarqué.
Lith plongea comme un météore, utilisant l’effet de glissement pour accélérer ses mouvements et une fine couche de magie noire pour cacher sa présence. Avant de quitter l’académie, il avait demandé à Linjos ce qu’il était advenu des cadavres des bêtes tombées.
Contrairement à ses attentes, au lieu de le punir ou de le réprimander pour son comportement lorsqu’il était sur le lit de mort de Protecteur, le directeur l’a simplement informé que Scarlett les avait enterrés dans une fosse commune près de la forêt.
Linjos n’a jamais eu l’intention de punir Lith pour ses paroles. Lui aussi avait perdu beaucoup d’amis ce jour-là, il pouvait donc comprendre les sentiments de Lith. Aussi, quand Linjos a vu son état après la tentative ratée de sauver la vie de Protecteur, il a considéré que l’affaire était close.
Aux yeux de Linjos, perdre un ami cher et presque sa propre vie le même jour était la pire punition que quelqu’un pouvait mériter.
Lith arrêta sa chute à quelques mètres du sol. Puis, il s’est déplacé en flottant dans les airs, pour ne pas faire de bruit. Grâce à la magie de l’air et des ténèbres, il était comme un fantôme, se déplaçant inaperçu derrière les lignes ennemies.
Il s’assurait également de toujours garder une maison entre lui et le Clacker le plus proche.
‘Après la dernière fois, j’ai appris ma leçon. Ces créatures ne se fient pas tant à leurs yeux qu’à leurs poils. La magie de l’air ne peut pas cacher mes mouvements. Je ne peux que rester aussi loin que possible d’eux et espérer que cela suffira.’
Grâce à la Vision de Vie, il put rapidement s’assurer que seuls des Clackers éclos se trouvaient à l’intérieur de la ville minière. Il ne trouva aucun signe de la présence de Soldats ou de la Mère Couveuse.
Plus il se rapprochait du charnier, plus il rencontrait de Clackers, jusqu’à atteindre un point où avancer sans être détecté devenait impossible.
Lith pris donc l’épée bâtarde, l’infusant avec la magie noire. Au lieu de se frayer un chemin jusqu’à la tombe, il a procédé lentement, en embusquant le Clacker le plus proche et en cachant son cadavre dans la dimension de poche pour ne pas laisser de traces derrière lui.
Lith répéta le processus jusqu’à ce qu’il ait un chemin clair devant lui. Avant d’avancer, il a tissé plusieurs sorts, se préparant au pire. Bientôt, il fut assez proche pour remarquer que le charnier avait été déterré et agrandi.
En la regardant avec la Vision de Vie, elle apparaissait comme un immense bassin de forces de vie, trop proche et trop nombreux pour qu’on puisse les distinguer les uns des autres.
Si la dryade a raison et que la mère couveuse avait transformé les cadavres en incubateurs, il était peu probable qu’elle ait laissé un bien aussi précieux sans protection. Lith a sprinté les derniers cent mètres, volant vers la destination.
Il n’avait aucune idée de la sensibilité de la perception des Clackers, mais il était presque sûr qu’ils le remarqueraient dès qu’il s’approcherait trop près. Et il avait raison.
Lith approchait du bord de la tombe quand il vit les pattes avant de deux Clackers soldats sortir de la fosse pour vérifier l’anomalie qu’ils avaient perçue.
Lith était trop rapide pour eux. Il a réussi à s’approcher avant que leurs têtes n’émergent complètement et les a attaqués alors qu’ils étaient encore sans défense. Il les a abattus d’un seul coup de couteau chacun, sautant par-dessus le bord et prenant par surprise les deux soldats restants.
Le premier est mort avant de réaliser ce qui s’était passé. Lith lui a tranché la tête et a lâché plusieurs lances de glace sur le dernier ennemi. Malgré le choc, le Soldat réussit à dévier la plupart des lances avec de la vraie magie.
Le Clacker fut transpercé à plusieurs reprises, perdant la moitié de ses jambes dans le processus, mais avant que l’intrus ne puisse le terrasser, il parvint à donner l’alerte.
Faisant fi de sa propre sécurité, la créature utilisa le dernier brin de mana dont elle disposait pour frapper le sol dans une séquence précise, afin d’alerter sa déesse de la menace imminente pour la colonie.
