Traducteur: linkfet
============
« Eh bien, je suppose que c’est comme ça que ça se passe. » Marmonna Amane en regardant la liste des noms de haut en bas. Les résultats des tests de la semaine précédente étaient arrivés, et Amane était venu les vérifier comme le reste de sa classe.
Classé vingt et unième, Amane se situait autour de son score habituel. C’était un classement assez bon, mais pas un résultat qui se démarquait. Il n’avait pas trouvé cet examen plus difficile que les précédents, bien que ce fût toujours un soulagement de voir qu’il avait fait aussi bien qu’il l’avait prévu.
Sans surprise, Mahiru régnait sur tout le reste à sa position habituelle de première place. Elle était vraiment un génie, mais Amane savait parfaitement qu’elle n’atteignait pas cette position sans faire des efforts. Amane l’avait souvent vue étudier après le dîner. Il ne prétendrait pas que Mahiru n’était pas intelligente, mais il était convaincu que c’était surtout son travail acharné qui la plaçait au sommet.
« Shiina est encore première, hein ? »
« Évidemment. L’ange est à un tout autre niveau. »
Ces déclarations provoquèrent une légère aigreur sur le visage d’Amane.
« … Pourquoi tu fais cette tête ? Ton classement est si mauvais que ça ? » Itsuki s’approcha, perplexe devant l’expression étrange de son ami.
Seuls les cinquante meilleurs scores avaient été affichés. Ainsi, Itsuki n’était pas venu pour voir son propre score, mais simplement pour accompagner Amane.
« C’est rien. Je suis vingt et unième. »
« Oh ? Ce n’est pas mieux que la dernière fois ? »
« Juste un peu. Faut prendre en compte la marge d’erreur. »
« Whoa, vous les intelligents, vous parlez vraiment un dialecte complètement différemment du notre, simples mortels. » Lança Itsuki avec un sourire.
« Ouais, ouais. » Amane ignora le sarcasme de son ami et se tourna à nouveau vers les classements de la classe. Il savait que Mahiru faisait vraiment de son mieux quand il s’agissait d’étudier. Cependant, elle n’aimait pas que tout cet effort se voie, alors elle travaillait sans relâche en secret pour que ses réussites paraissent naturelles. Les autres pouvaient la féliciter ou la qualifier de génie, mais comme ils ignoraient toute la lutte en coulisses, ils ne pouvaient pas reconnaître ses véritables accomplissements.
Cela devait être une manière oppressante de vivre pour Mahiru.
« … Je devrais au moins faire quelque chose. » Murmura Amane.
« Hein ? Qu’est-ce que t’as dit ? »
« Rien. Allez, on retourne en classe. »
« ’Kay. »
***
« Hm ? Qu’est-ce que c’est, Amane ? »
Mahiru était allée au supermarché et était revenue avec des ingrédients pour le dîner. Lorsqu’elle avait commencé à les ranger dans le réfrigérateur, une boîte blanche, inhabituelle et étrangère, avait attiré son attention.
« Hmm ? Ah, c’est un gâteau. »
Mahiru avait probablement déjà une petite idée du contenu de la boîte à en juger par sa forme, mais elle avait quand même posé la question. Amane s’était rendu dans une pâtisserie que Chitose mentionnait souvent sur les réseaux sociaux pour acheter le gâteau.
« … Tu aimes les gâteaux ? » Demanda Mahiru.
« Pas vraiment. Je l’ai acheté pour toi. »
« Quoi ? Pourquoi ? »
« Je pensais que ce serait sympa de fêter un peu ta première place aux tests. C’est pour te féliciter. »
Mahiru cligna des yeux rapidement plusieurs fois, incapable de comprendre que le gâteau était pour elle. Elle semblait très surprise.
« M-mais, je suis toujours première, donc ce n’est pas vraiment quelque chose à fêter. » Protesta-t-elle.
« Eh bien, tu travailles toujours dur, alors je pensais que ça te ferait plaisir de recevoir une récompense pour une fois. C’est un short-cake. J’espère que tu aimes ça. »
« Ah ? Je veux dire… Je ne déteste pas ça, en tout cas… »
« Génial. Manges-en après le dîner. »
Bien que Mahiru semblait encore un peu troublée, Amane coupa court à la conversation. Il avait décidé qu’il valait mieux agir comme si ce n’était pas grand-chose, car Mahiru semblait toujours gênée quand on la traitait comme quelqu’un de spécial.
Mahiru était du genre à s’épuiser en prenant soin des autres, mais elle se négligeait elle-même en contrepartie. Amane ne l’avait jamais vue faire quoi que ce soit pour se faire plaisir, et à chaque fois qu’on la félicitait ou qu’on lui montrait de la reconnaissance, elle redoublait d’efforts, au risque de se surmener. En résumé, Mahiru n’était pas douée pour accepter la gentillesse des autres.
Amane ne la connaissait pas depuis si longtemps, mais il était certain de cela. C’est pourquoi il voulait lui rendre un peu de la gentillesse qu’elle lui montrait toujours.
Amane sourit de nouveau en voyant Mahiru tout préparer dans la cuisine et commencer à cuisiner pour le dîner de ce soir-là.
Après le dîner, Mahiru déposa le gâteau sur une assiette et l’apporta sur la table basse avec une expression nerveuse. Amane ne put s’empêcher de rire à la vue.
« Po-pourquoi tu ris ? »
« Rien. Ne t’en fais pas. »
« Ça ne semble pas être rien. »
« C’est bon, arrête de t’inquiéter. »
Amane trouvait amusant que Mahiru soit si tendue, mais son rire semblait la gêner. Il était censé lui montrer de la reconnaissance, pas se moquer d’elle, alors il se tut rapidement.
Mahiru posa le gâteau et le café qu’elle avait apporté sur la table basse, puis s’assit sur le canapé.
Ses mouvements étaient toujours un peu raides, et Amane sentit un autre éclat de rire monter, mais comme Mahiru était assise à côté de lui, il fit de son mieux pour réprimer l’envie.
Avec une lueur timide dans les yeux, Mahiru jeta un coup d’œil à Amane.
« Bon, félicitations. » Dit-il.
« … Merci beaucoup. Mais… »
« C’est bon, profite. Tu as travaillé dur. »
« C’est vrai, mais… »
« Allez, mange. Même toi, tu devrais te faire plaisir de temps en temps. »
C’était fait, et le gâteau était déjà là. Mahiru ne pouvait pas s’y opposer. Elle hocha légèrement la tête avant de prendre l’assiette du gâteau et une fourchette.
« Très bien, je vais l’accepter avec gratitude alors. » Dit-elle.
« Vas-y, je t’en prie. »
Avec un geste délicat, Mahiru découpa le gâteau en morceaux faciles à manger avec sa fourchette et en goûta prudemment. Amane imaginait que les filles étaient naturellement très exigeantes avec leurs sucreries, mais comme il avait pris le gâteau dans l’une des pâtisseries préférées de Chitose, il était assez sûr de son choix.
Il sut que son instinct avait été juste en voyant les yeux de Mahiru s’agrandir légèrement lorsque le gâteau toucha sa bouche, puis les coins de ses lèvres se détendre légèrement. D’habitude, les expressions de Mahiru ne changeaient pas beaucoup, mais récemment, elle semblait un peu plus animée, ou peut-être qu’Amane était devenu meilleur pour lire ses émotions.
L’expression détendue et insouciante que Mahiru laissait transparaître alors qu’elle savourait lentement son gâteau, en était une qu’elle n’affichait que pendant les repas.
« … Hmm ? Il y a un problème ? » Elle devait avoir remarqué qu’Amane la fixait, et il détourna rapidement le regard.
« Non, rien. » Répondit-il précipitamment.
C’était maintenant au tour de Mahiru de fixer Amane. Soudain, elle reprit la fourchette, comme si une idée venait de lui traverser l’esprit. Elle piqua un morceau de gâteau et le tendit vers Amane d’une manière suggestive. Autrement dit, elle proposait de le nourrir.
« Oh, euh… Non merci, je n’en voulais pas vraiment. » Protesta Amane.
« Vraiment ? » Demanda Mahiru.
« … Bon, eh bien, euh… Si ça ne te dérange pas, je suppose que je vais en prendre un peu, mais euh… »
Amane ne s’attendait certainement pas à cette tournure des événements. Pris au dépourvu, il accepta malgré lui.
Se faire nourrir du gâteau par une belle fille, c’était un rêve pour de nombreux garçons adolescents. Malheureusement, la timidité d’Amane l’empêchait de pleinement profiter de la situation.
« C’est toi qui l’as acheté, Amane, alors tu dois en manger aussi. »
Mahiru semblait totalement inconsciente des implications de son geste. Elle garda une expression ordinaire, sans se rendre compte, tandis qu’elle tendait le gâteau vers sa bouche.
Il ne pouvait pas la refuser, alors Amane prit son courage à deux mains et mordit dans le morceau.
Un goût incroyablement sucré envahit instantanément sa bouche.
« … C’est follement sucré. » Dit-il.
« Eh bien, c’est un gâteau. »
Ce n’était pas ce qu’Amane voulait vraiment dire, mais Mahiru resta impassible.
La douceur se répandit dans la bouche d’Amane, mais il était trop préoccupé par autre chose pour apprécier pleinement la saveur.
« … Ça ne te paraît pas bizarre ? » Demanda-t-il d’une voix basse. Il était presque étouffé par la douceur et la gêne, tandis que Mahiru agissait comme si tout cela était parfaitement normal. Amane attrapa la fourchette des mains de Mahiru et lui tendit un morceau de gâteau de la même manière qu’elle l’avait fait pour lui.
Après tout, on récolte ce que l’on sème, non ?
« … Euh. » Mahiru hésita.
« Mange. » Insista Amane, sur un ton étonnamment ferme. Mahiru semblait encore plus confuse. Sachant probablement qu’elle avait commencé cela, elle décida de jouer le jeu et prit timidement une petite bouchée. Cela rappelait à Amane un petit oiseau picorant quelque chose.
Amane observa Mahiru pendant qu’elle mâchait, et peu à peu, un changement s’opéra en elle. Au départ, elle paraissait complètement perplexe, mais au fur et à mesure qu’elle mâchait, une légère rougeur s’étendit sur son visage. Au moment où elle avala le gâteau, il n’y avait plus moyen de cacher son évidente gêne. Les joues habituellement blanches comme du lait de Mahiru ressemblaient maintenant à des pommes, et ses yeux brillaient, légèrement embués de larmes.
« Alors, qu’en penses-tu ? » Demanda Amane.
« C-c’était d-délicieux… »
« Je ne parlais pas du gâteau. Qu’est-ce que ça fait d’être nourrie ? »
Mahiru devait sûrement comprendre maintenant comment Amane s’était senti plus tôt. Ses yeux se baissèrent vers le sol tandis qu’elle tremblait légèrement.
« … J’ai très envie de fuir. »
« Je parie que c’est bien le cas. C’est exactement le genre de chose qui pourrait donner une mauvaise impression, tu sais. Garde ça pour tes amies, d’accord ? » Amane se détourna brusquement pour souligner son point.
« D’accord. » Répondit Mahiru d’une voix à peine audible.
Elle avait probablement nourri Amane si facilement parce qu’elle lui faisait confiance. Mahiru n’avait bien sûr aucune mauvaise intention, mais c’était quand même gênant.
Un goût de douceur tenace persistait encore dans la bouche d’Amane.
Il paraît qu’avoir quelqu’un qui se sent trop en sécurité autour de toi peut poser d’autres types de problème.
Finalement, Mahiru se recroquevilla en boule à côté d’Amane, légèrement embarrassée, laissant échapper un petit soupir.
