Traducteur: TheCounterspell
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Lith comprenait pourquoi son apparition avait provoqué tant de colère. La ville possédait de nombreuses portes et chacune d’entre elles comportait une file d’attente de plusieurs centaines de mètres qui s’allongeait de minute en minute.
Les marchands, les voyageurs et même les habitants devaient passer plusieurs contrôles pour entrer ou sortir. La porte Warp était une voie rapide, généralement réservée aux nobles et aux hauts fonctionnaires. Lith les ignora, activant sa Vision de Vie pour vérifier s’il pouvait décoller.
Son expression surprise fut prise par certains pour de l’indignation, ce qui les incita à reprendre leurs jurons. Lith s’en moqua éperdument et tourna sur lui-même pour s’assurer que ses yeux ne lui jouent pas un tour.
Les matrices n’étaient pas en position fixe. Contrairement à l’académie et au palais royal, il s’agissait d’un véritable maelström. Les énergies magiques couvraient toute la ville en permanence, mais elles changeaient aussi de taille et de hauteur sans prévenir.
Lith regarda un mage voler au-dessus de la ville, jusqu’à ce que la matrice devienne comme un ouragan et atteigne le ciel. Le pauvre homme tomba comme une pierre, s’écrasant sur un toit avec des conséquences mortelles.
“Avancez, monsieur. Sinon, vous risquez de vous faire écraser.” La voix du garde réveilla Lith de sa stupeur. Il s’éloigna à double pas, désireux de trouver un meilleur point de vue qui lui permettrait d’étudier Bélius.
La ville était entourée de murs de pierre de vingt mètres de haut et de tours d’observation régulièrement espacées. Chacune d’entre elles était surmontée de cristaux magiques bleus de la taille d’une personne.
Lith et Solus observèrent les matrices pendant un certain temps, les regardants se déplacer comme une marée. Chaque fois qu’un des sorts que les formations étaient censées annuler était utilisé, même à une distance considérable de la cité, les tours le détectaient.
Elles produisaient alors un éclair d’énergie mystique invisible à l’œil nu, marquant le mage comme cible. Les matrices se transformaient en fonction des informations reçues, tuant leurs victimes presque instantanément.
Grâce à ses sens accrus et au grand arbre qu’il avait escaladé, Lith put apercevoir de loin plusieurs tours placées le long de la chaîne de montagnes, s’étendant à perte de vue.
‘Par mon créateur, ces tours sont des points de relais pour les matrices de Belius.’ Ces révélations sidérèrent Solus.
‘Oui, elles permettent aussi à la magie de scellement de localiser sa cible et d’envoyer un signal d’alarme.’Se dit Lith autant à lui même qu’a Solus. ‘Les cadavres des idiots que nous avons vus essayer de contourner les contrôles de la ville ont tous été rapidement ramassés.’
Il n’avait aucune idée de ce qui se passait réellement, mais il pouvait voir une Marche Warp et plusieurs silhouettes humanoïdes apparaître à l’endroit où les intrus étaient tombés quelques secondes après leur mort.
‘Tout s’est passé trop vite pour être une coïncidence.’ Lith a supposé que, comme pour l’Académie, les gardes d’élite pouvaient ignorer les matrices et se déplacer librement.
‘Une formation magique presque vivante, capable de changer de forme. Quand je pense que Yurial se plaignait toujours de l’inutilité des Gardiens.’ Un sourire triste apparut sur le visage de Lith en pensant à son ami mort.
‘J’aimerais qu’il soit encore en vie, ici avec nous. Je pourrais enfin lui dire “je te l’avais bien dit”.’
Lith sauta au sol, atterrissant avec une roulade pour amortir sa chute. Cela ne pouvait pas vraiment le blesser, mais il était encore dans une zone où la magie de l’air était annulée par les matrices. Ni son armure ni ses sorts ne pouvaient justifier qu’il soit indemne, il devait donc jouer la carte du soldat d’élite.
Il dut courir sur plus d’un kilomètre pour sortir des limites des matrices. Ce n’est qu’alors qu’il put sortir de sa dimension de poche la carte de la région de Kellar et la placer dans Soluspedia à la place de celle du Marquisat de Distar.
‘Nous avons jusqu’à quatre mois devant nous.’ pensa Lith. ‘Planifions notre patrouille de manière à donner la priorité aux villes perdues.’
La région de Kellar était en grande partie inexplorée. À part les grandes villes comme Belius, de petites colonies apparaissaient aussi vite qu’elles disparaissaient. Dans le nord, une vague de froid suffisait à geler à mort quiconque ne possédait pas une maison correctement isolée.
Les monstres se déchaînaient, massacrant les petits villages pour un casse-croûte de minuit. Enfin, il y avait les Rangers comme Lith. La plupart de ces petits villages étaient illégaux, un refuge pour les bandits, les déserteurs et tous ceux qui avaient une aversion pour le paiement des impôts.
Ils appréciaient la sécurité assurée par les patrouilles de l’armée, tout comme le confort d’emprunter les routes pavées par le Royaume pour relier les zones rurales aux principales villes commerçantes.
Pourtant, ils tenaient tout pour acquis et considéraient la dureté de la vie dans le nord comme une raison suffisante pour être exemptés du paiement de leurs impôts.
Au cas où de tels établissements seraient découverts par des soldats, l’un des deux devait disparaître.
Lith volait suffisamment haut pour vérifier avec la Vision de Vie une large zone pendant qu’il se dirigeait vers sa première destination, la ville déchue de Kaduria. Le paysage était différent de celui auquel il était habitué dans le Marquisat de Distar.
Alors que son lieu de naissance était principalement composé de terres cultivées et de forêts remplissant l’espace entre les zones peuplées, Kellar était principalement stérile. C’était encore la fin de l’automne, mais la neige recouvrait déjà le sol et la cime des quelques arbres que Lith rencontrait.
Depuis son départ de Belius, il n’avait rencontré ni fermes ni villages. La terre gelée était pleine de roches, ce qui la rendait peu fertile sans un effort considérable. La région où se trouvait Lith était trop éloignée de la route principale pour qu’un quelconque commerce soit rentable.
Les seules formes de vie qu’il rencontrait étaient des animaux en quête de nourriture. L’hiver approchait et ceux qui n’avaient pas assez de réserves de graisse allaient connaître une mauvaise fin.
Après plusieurs heures de vol, Lith commença à se sentir fatigué.
‘Je n’ai pas encore complètement récupéré des soins apportés à Kalla, ce soir j’aimerais bien dormir un peu. Solus, avons-nous rencontré un geyser de mana sur notre chemin ?’
‘Aucun, mais je crois que même sans source d’énergie externe, je peux au moins former le rez-de-
chaussée de la tour.’ Repondit-elle.
‘Tu me demandes de dormir pendant que tu travailles comme une folle ? Pas question, nous sommes dans le même bateau. Soit nous nous reposons tous les deux, soit j’utilise Invigoration.’
‘Ou nous pourrions dormir ici.’ Solus lui montra la fumée qui sortait de plusieurs cheminées visibles à l’horizon.
“Et putain de merde!” maugréa Lith. Une colonie humaine était la dernière chose qu’il voulait rencontrer. Il utilisa l’amulette de communication de l’armée pour appeler son supérieur.
“Ranger Lith Verhen appelle le Nid, vous me recevez ?”
“Fort et clair.” Dit une voix féminine venant de l’autre côté. Contrairement à l’amulette de Lith, celle fournie par l’armée était gravée de plusieurs cristaux de mana vert qui, entre autres choses, renforçaient son signal.
Les pierres précieuses émettaient une série d’éclairs, scannant son environnement.
“Vous méritez votre réputation, Ranger Verhen. Couvrir autant de terrain en une seule journée est digne d’éloges. Veuillez me faire un bref rapport de vos découvertes.” C’était une façon polie de lui demander de prouver qu’il n’avait pas ignoré son devoir de patrouille.
Il n’y avait pas grand-chose à dire, mais Lith avait pris note de tous les repères non cartographiés qu’il avait rencontrés sur son chemin. Il était certain qu’ils avaient été laissés de côté volontairement, certains étaient trop évidents pour être manqués, à moins d’être aveugle, sourd et muet.