— Je me suis réduit à ça… Finalement, je ne vaux pas mieux qu’elle.
Shinji s’apprêtait à tuer la jeune fille.
Autour de lui, les regards se plantaient comme des lames. Les passants s’étaient figés.
Peur, dégoût, incompréhension. Leur mépris le rongeait, mais il ne reculerait pas. Pas si près de la fin.
Il leva les yeux une dernière fois.
Et elle souriat.
Un sourire fragile. Léger. Presque familier.
Elle tendait les bras vers lui. Ils tremblaient. Des larmes coulaient sur ses joues, mais elle souriait — comme si elle accueillait la mort.
— Ce sourire… Qui es-tu ?
— Je t’attendais, Shinji.
Sa voix était douce. Résignée.
Quelque chose se brisa en lui. Une peur primitive s’empara de ses entrailles.
Ses doigts glissèrent sur la lame.
— Qu’est-ce que je fais ?
Ce sourire… c’était une trace d’humanité, alors qu’elle savait que seule la mort l’attendait.
Et en lui, tout refusait de la traverser.
Il n’avait pas le droit d’échouer. Mais il avait vacillé.
Il voulut reprendre le contrôle.
Trop tard.
Un souffle fendit l’air.
Son genou heurta la pierre dans un craquement net. La rotule céda. Il ne sentit pas la douleur — seulement une chaleur étrange qui remontait le long de ses côtes brisées.
Deuxième impact.
Un éclair rouge. Le vide dans sa gorge. Un goût métallique. Il voulut parler. Rien ne sortit.
Il s’effondra.
L’assassin ne se montra pas.
Pas de visage. Pas de voix. Rien que le silence.
Il allait mourir sous les balles d’un homme qui, lui, n’avait pas hésité.
Pas comme lui.
Son corps se disloquait. Fibre par fibre. Une paralysie rampante noyait sa volonté.
Il ne pouvait plus lutter.
— T’attends quoi… Tue-moi.
Mais ses cordes vocales étaient rompues. Seul un souffle muet.
Dans le flou de sa vision, une silhouette.
Elle.
Mais ce n’était plus elle.
Son ombre riait. Un rire distordu, inhumain. Vénéneux.
— C’est donc ça… ce qu’on ressent, à la toute fin ?
Le sang poissait la pierre. L’odeur du métal saturait l’air.
Il n’était plus qu’une coquille vide.
— Je… n’entends plus les cris.
Même l’ouïe l’abandonnait.
Il comprenait : il n’y aurait pas de miracle.
Alors il pensa à eux.
Ses parents. Les seuls qu’il ait vraiment aimés.
Il revit le rire de sa mère. Le silence complice de son père. Une vie modeste, mais vraie.
Il lâchait prise. Il cherchait la paix — même factice — dans cette fin sale et lente.
— Maman… Papa…
Il ne demandait plus qu’une chose : que la mort lui rende ce qu’elle lui avait pris.
La tristesse était ce qui le tenait encore éveillé.
Puis la pluie. Froide sur sa peau.
Et soudain, une lumière.
Aveuglante. Une fracture dans le ciel.
Il perdit la vue.
Et dans cette lumière… un regard.
Celui qu’il connaissait trop bien.
Le regard de la femme qui lui avait tout pris.
— Pas toi.
Il aurait voulu que ce soit elle qui meure. Pas lui.
Même au seuil de la mort, il la maudissait encore.
La lumière devint un cri.
Une voix féminine, brisée par le chagrin et la rage.
— Pourquoi maintenant ? Après tout ce que j’ai fait… À cause de toi… Pourquoi ? ENMA !
Puis le silence brisé par les pleurs de la femme.
— Je ne veux plus souffrir… Je te fais confiance, une dernière fois… Libère-moi…Argus.
La lumière s’éteignit. Son esprit dérivait.
Il ne distinguait plus le rêve du réel.
— Et si tout cela… n’était qu’un cauchemar ?
Peut-être était-il encore dans son lit, dans un monde plus tiède, plus simple.
Mais non.
Il était à la frontière de la mort.
Et cette lueur d’espoir n’était qu’un mensonge.
Il ne restait qu’une chose. Dévorante.
Ce n’était plus de la simple haine.
C’était autre chose. Une mer noire. Immobile. Inéluctable.
— Je savais que je ne pouvais pas te faire confiance…
Ses émotions n’avaient plus rien d’humain.
Elles ne pouvaient naitre qu’au sein d’un monstre qui a perdu toute humanité.
— Pourquoi… après tout ce que j’ai fait…
Il voulut hurler. Le vide lui répondit.
Et pourtant, il avançait encore. À genoux. Aveugle.
Une ruelle. Sombre. Étrangement familière.
Peut-être un souvenir. Peut-être un piège.
Mais il le savait : ses souffrances ne faisaient que commencer.
Et à cet instant précis, Shinji… sombra.
Avec tous les secrets d’une vie qu’elle lui avait brisée.
Salut, je suis l’auteur de The Man Drowned In Hatred, Lightnovelfr ont gentiment accepté de me laisser poster mon webnovel sur leur site. J’espère que le prologue que vous venez de lire vous a plu et que le reste du novel vous plaira tout autant voir plus. Bonne lecture à vous!!